Depuis le mois de juillet, les services de sécurité congolais multiplient des arrestations des personnes soupçonnées d’appartenir au M23 en Ituri. Les dernières arrestations remontent au 9 août à Tchomia sur le littoral du Lac Albert. Le M23 serait-il en train de se déployer en Ituri via l’Ouganda ? 

Bonjour et bienvenue dans ce 32e  épisode de la saison 4 de Po Na Biso, la capsule audio d’Ebuteli et du Groupe d’étude sur le Congo (GEC) qui tente d’éclairer l’actualité de la RDC. Je suis Agenonga Chober  chercheur principal pour les Uélé à Ebuteli. Nous sommes le vendredi 16 août 2024.

Tout est parti le 31 juillet lorsque de violents affrontements ont simultanément éclaté à Tchomia et Kasenyi, deux agglomérations situées entre 60 et 70 km de Bunia au littoral du Lac Albert, coûtant la vie à deux  officiers des Forces armées de la RDC (FARDC). Les enquêtes de l’auditorat militaire à la suite de cet incident ont pointé la milice Zaïre dont 3 combattants accusés d’être liés au M23 ont aussitôt été arrêtés. Ensuite, le vendredi 9 août, les services de sécurité ont annoncé l’arrestation des dizaines d’autres personnes à Tchomia, parmi lesquelles, deux auraient été formées par des instructeurs rwandais à Buwa dans la même zone. Au cours du mois précédent, les services de sécurité avaient déjà arrêté deux personnes à Mahagi accusées d’être en intelligence avec le M23 avant de les transférer à Kinshasa.

Avant l’incident de Tchomia et de Kasenyi, le porte-parole du gouverneur militaire de l’Ituri avait accusé Thomas Lubanga, leader de l’Union des patriotes congolais (UPC) d’être de mèche avec la milice Zaïre, accusation rejetée par son parti politique. Lubanga a ensuite été convoqué par l’auditorat militaire supérieur à la suite d’une plainte des services de sécurité.

Les dynamiques sur le terrain militent-elles pour les allégations d’une infiltration du M23 en Ituri ? Le dernier rapport des experts de l’ONU confirme une éventuelle connexion entre le M23 et les groupes armés actifs en Ituri. Ce rapport a révélé non seulement que les représentants de l’Alliance fleuve Congo (AFC) se sont rendus dans le fief du Zaïre à Djugu, mais aussi que certains combattants du Zaïre se sont rendus à Kampala et à Bunagana pour y rencontrer les responsables de l’AFC et participer à des formations militaires.

En plus, certaines sources  confirment que des instructeurs du M23 se seraient rendus à Buwa en Ituri sur le littoral du Lac Albert pour assurer la formation du Zaïre. Ce qui signifie que ces instructeurs transiteraient par l’Ouganda qui  au même moment, s’affichant comme un partenaire de la RDC dans la traque des ADF, est accusé  de soutenir le M23.

Si réellement les combattants soupçonnés d'appartenir au M23 transitent par l'Ouganda pour renforcer la milice Zaïre, y aurait-il lieu de redouter le scénario de la conquête de Bunagana par le M23 via l'Ouganda  ? Pour l'instant, il n'y a pas encore assez d'éléments pour le démontrer.

La plus grande menace du M23 en Ituri viendrait plutôt du Nord-Kivu. Mais jusque-là, il n'y a pas de proximité géographique entre les zones contrôlées  actuellement par le M23 au Nord-Kivu et celles où opèrent les miliciens Zaïre en  Ituri.

Pour l'instant, l'hypothèse d'une présence du M23 en Ituri ne semble pas plausible. Cependant, ce mouvement serait toujours tenté de préparer le terrain pour étendre sa zone de contrôle dans cette province.

Cette dynamique relance en même temps l'éternel débat sur la capacité des services de sécurité à anticiper les menaces des groupes armés. Le constat sur le terrain a démontré que l’armée congolaise a souvent été moins proactive que défensive, parfois à cause du déficit des moyens logistiques, des effectifs et de renseignements.

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