Le Sommet de Luanda n’a pas eu lieu. Censé aboutir à la signature d’un accord de paix entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, et mettre un terme à la crise du M23, ce sommet a été annulé en dernière minute, de quoi susciter l’ire du gouvernement congolais et de l'opinion en RDC. Que se passera-t-il après ? 

Bonjour ! Je m’appelle Fred Bauma. Je suis analyste et directeur exécutif d'Ebuteli. Vous écoutez le 50e et dernier épisode de la saison 4 de Po Na Biso, capsule audio d’Ebuteli et du Groupe d’étude sur le Congo (GEC). Nous sommes le vendredi 20 décembre 2024.

Le président Félix Tshisekedi s’est retrouvé seul à Luanda où il devait rencontrer son homologue rwandais Paul Kagame dans le cadre du processus de paix facilité par le président angolais. Cette rencontre, qui a suscité beaucoup d’espoir, devait marquer un tournant vers la désescalade du conflit qui oppose les deux pays depuis fin 2021 et la résurgence du M23. 

Elle devait aussi permettre de capitaliser les progrès du processus de Luanda après la mise en place récente d’un mécanisme de vérification avancé et la signature d’un concept d’opérations qui devrait en principe conduire à la neutralisation des FDLR, au retrait des troupes rwandaises présentes en RDC et à la stabilisation de la région occupée par le M23. 

Qu’est-ce qui n’a donc pas marché ? Officiellement, la cause du blocage est un désaccord sur une question de fond : l’exigence faite par le Rwanda d’un dialogue direct entre le gouvernement congolais et le M23. Pour le Rwanda, cela devait permettre d'adresser les causes profondes de la crise. Cependant, pour le gouvernement congolais, il s’agit d’une preuve de plus de la mauvaise foi du Rwanda qui ajoute continuellement des éléments de blocage. 

La situation sur terrain ne cesse de se dégrader. Malgré le cessez-le-feu signé en août, les combats entre le M23/RDF et l’armée congolaise soutenue par les milices locales ont repris. Le M23 progresse désormais vers le centre du territoire de Lubero et s'approche de la ville de Butembo, important centre commercial de l’est de la RDC. Plusieurs sources locales alertaient depuis quelques semaines sur des renforts du côté M23 laissant présager la reprise des hostilités. Les combats dans le Lubero ont également provoqué des nouveaux mouvements des populations qui s’ajoutent aux millions de déplacés internes dans la province du Nord-Kivu. L’espoir pour la paix s’éloigne. 

L’échec du sommet de Luanda ne constitue pas pour autant la fin du processus. Le ministre angolais des Affaires étrangères a d'ailleurs relancé les consultations aussitôt après le rendez-vous manqué de Luanda. Il s’est notamment rendu à Kigali où il a rencontré le président rwandais. Le gouvernement congolais s’est par ailleurs montré ouvert, pour la première fois, à réintégrer le M23 dans le processus de Nairobi. 

Cependant, ces deux processus ne pourront pas aboutir à la paix durable sans un réel engagement des acteurs et sans prendre en compte l’évolution du contexte sur terrain. Pour ce qui est des acteurs internationaux, sans une pression forte sur le Rwanda, il sera difficile d’arriver à un retrait des troupes en RDC. Malgré de nombreux rapports crédibles sur le soutien rwandais au M23, les pressions sur ce pays ne sont que rhétoriques pour l’instant, et son image n’en pâtit pas, bien au contraire. En ce qui concerne le processus de Nairobi, il nécessite une reformulation. Des nombreux groupes concernés par ce processus ont transformé leur relation avec la RDC et sont devenus +des alliés de l’armée nationale sur terrain. Cela complexifie davantage les efforts de démobilisation et de démilitarisation de la région du Nord-Kivu. 

Sans repenser les deux processus, et sans une pression concertée sur le Rwanda et la RDC, il sera difficile d'espérer une fin de conflit par des voies diplomatiques. Et comme l’année dernière, des millions de Congolais passeront le nouvel an dans le deuil et le désespoir de la vie de déplacé. 

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