Les femmes toujours marginalisées dans les processus de paix en RDC
En avril, Malte a placé l'égalité des genres et la participation des femmes dans les processus de paix et de sécurité au centre de sa présidence du Conseil de sécurité. Pétronille Vaweka, coordinatrice nationale du centre « Femmes Engagées pour la Paix en Afrique », a notamment donné un briefing lors d'une réunion du Conseil de sécurité sur la situation dans la région des Grands Lacs. La résolution 1325, adoptée en 2000, a marqué une avancée majeure en reconnaissant le rôle crucial des femmes dans la prévention des conflits et la consolidation de la paix. Mais en quoi consiste exactement cette résolution et comment est-elle appliquée dans le contexte spécifique de la République démocratique du Congo (RDC) ?
Bonjour !
Je suis Alice Viollet, Responsable de programme du Groupe d’étude sur le Congo (GEC). Vous écoutez le 18e épisode de Po Na Biso, capsule audio d'Ebuteli et du GEC qui donne notre point de vue sur une question d’actualité en RDC. Nous sommes le vendredi 10 mai 2024.
Comme souvent, peu de mesures concrètes sont contenues dans cette résolution du Conseil de sécurité, qui n'est contraignante que sur le papier, l'Organisation des Nations unies (ONU) n'ayant pas vraiment de force de coercition pour obliger les États membres à se conformer à ses résolutions. Les 18 principes de la résolution 1325 soulignent l'importance de la participation des femmes à tous les niveaux de prise de décision dans les institutions et mécanismes nationaux, régionaux et internationaux pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits. La résolution demande également aux États membres de nommer davantage de femmes parmi les représentants et envoyés spéciaux, et de chercher à accroître le rôle et la contribution des femmes dans les opérations de maintien de la paix des Nations unies sur le terrain. Elle engage également le secrétaire général à appliquer un plan d'action stratégique (A/49/587) pour une participation accrue des femmes à la prise des décisions concernant le règlement des conflits et les processus de paix. En outre, elle insiste sur la nécessité de respecter scrupuleusement les dispositions du droit international humanitaire et des instruments relatifs aux droits humains qui protègent les droits des femmes et des filles pendant et après les conflits. Il faut aussi rappeler que malgré cette résolution et son plan d’action stratégique (A/49/587) pour l’amélioration de la situation des femmes au secrétariat, l’ONU n’a jamais connu de femme à sa tête depuis sa création en 1945.
Comme ailleurs dans le monde, la mise en œuvre de cette résolution est un défi dans l'est de la RDC. Dans cette région, le conflit armé persistant a eu des conséquences dévastatrices sur les femmes et les filles, qui sont souvent les premières victimes de violences sexuelles et de violences basées sur le genre. Bien que quelques progrès timides aient été réalisés, notamment sur la sensibilisation à l'importance de l'inclusion des femmes dans les processus de paix et de sécurité en RDC, en partie grâce aux efforts des organisations locales et internationales, ou encore la nomination de Julienne Lusenge comme coordinatrice adjointe du mécanisme de suivi de l'accord d'Addis Abeba, la participation féminine demeure limitée. Dans le cadre du processus de Nairobi, par exemple, une seule femme, Samia Suluhu, présidente de la République unie de Tanzanie, était présente parmi les huit dirigeants des pays de la Communauté d'Afrique de l'Est. Ceci est le reflet d’une tendance plus générale, la sous représentation des femmes comme chefs d’État.
Les gouvernements de la région sont majoritairement masculins, de même que les représentants des groupes armés impliqués. Bien que quelques femmes y aient participé, majoritairement comme représentantes de la société civile, la présence féminine reste marginale. Le mini-sommet de Luanda, premier pas de l’autre processus principal de la crise du M23, qui s'est tenu le 23 novembre 2022, n'a pas dérogé à cette tendance. N’était présente qu’une seule femme, Michelle Ndiaye, représentante spéciale du président de la Commission et chef du bureau de liaison de l'Union africaine en RDC. La présence féminine dans les autres étapes de ce processus de Luanda était similaire, limitée à quelques représentantes restreintes.
Ainsi, la mise en œuvre de la résolution 1325 dans le contexte du conflit à l’est de la RDC demeure limitée. Reste à savoir si le nouveau gouvernement de Judith Suminwa, dirigé par la première femme à occuper le poste de Première ministre dans l'histoire de la RDC, marquera un véritable tournant vers l'intégration des femmes aux processus de négociations, alors qu’elles sont pourtant essentielles à l’établissement d’une paix durable.
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