Impasse diplomatique sur la crise dans l’est de la RDC : l'initiative CENCO-ECC peut-elle être une alternative efficace ?
Alors que l’Alliance fleuve Congo (AFC) et le Mouvement du 23 mars (M23) poursuivent leur offensive sur les lignes de front au Nord-Kivu et au Sud-Kivu, malgré le cessez-le-feu décrété à Dar-es-Salam, les deux principales confessions religieuses en RDC tentent de relancer le processus de dialogue pour le retour de la paix. Après des consultations à Kinshasa, à Goma et à Kigali, les représentants de l’Église catholique et de l’Église protestante sont attendus à Bruxelles d’ici la fin de la semaine pour leur mission diplomatique. Quelle issue peut offrir cette initiative de médiation religieuse ?
Bonjour et bienvenue dans ce sixième épisode de Po Na Biso, capsule audio d’Ebuteli et du Groupe d’étude sur le Congo de l’Université de New-York, qui analyse chaque semaine un sujet de l’actualité congolaise. Je m’appelle Henry-Pacifique Mayala. Je suis le coordonnateur du Baromètre sécuritaire du Kivu. Nous sommes le vendredi 14 février 2025.
Après avoir rencontré le président de la République et certains acteurs socio-politiques à Kinshasa, une délégation composée des Messeigneurs Fulgence Muteba, et Donatien Nshole, respectivement président et secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), ainsi que des pasteurs André Bokundoa et Éric Senga pour l’Église du Christ au Congo (ECC), est arrivée le mercredi 12 février à Goma. L’objectif de cette visite était de discuter avec les dirigeants du M23/AFC avant de poursuivre les consultations à Kigali et à Bruxelles où la délégation pourrait rencontrer des membres clés de l’opposition politique congolaise.
Cette initiative interne semble venir à la rescousse des processus de paix de Luanda et Nairobi aujourd’hui essoufflés par la persistance du conflit. À Dar-es-Salam, les dirigeants de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) et de la Communauté de développement de de l’Afrique australe (SADC) ont décidé de fusionner ces deux processus, reconnaissant de ce fait leur inefficacité. Pour rappel, les deux processus de paix initiés en 2022 disposent et ont tous deux déployé des moyens militaires et diplomatiques significatifs pour la stabilisation de l’est du Congo. Mais tout au long du processus, chaque partie a favorisé l'initiative dont les médiateurs étaient les plus alignés avec ses intérêts, tandis que sur le terrain, la situation ne cessait de se dégrader. La fusion de ces deux processus dans leurs formats actuels n’apporterait que très peu d’avancées. Leurs chances de réussite s’effritent aussi avec l’avancée du M23 au Sud-Kivu et la position actuelle du Burundi qui, au-delà d’avoir perdu beaucoup d’hommes aux fronts, voit la menace s’approcher davantage de ses frontières.
Dans ce contexte, la médiation des religieux pourrait apparaître, à ce stade, comme l’approche la plus légitime, car elle intègre à la fois les dynamiques et acteurs internes qu’externes du conflit. Toutefois, très vite, les oppositions à l’initiative se sont fait entendre en RDC et particulièrement dans la partie ouest du pays et au sein du parti présidentiel. Les détracteurs de cette démarche restent convaincus que, malgré les revers de l’armée, la voie militaire demeure la solution à cette crise et estiment que les confessions religieuses vont au-delà de leur rôle dans un État laïc.
D’autre part, à l’absence d’un processus viable et au vu des réalités sur le terrain militaire, il y a des voix qui s’élèvent pour une solution politique et trouvent dans cette initiative des religieux une opportunité de préserver des vies. Vital Kamerhe, président de l'Assemblée nationale, semble être de ce bord, ce qui lui a valu des menaces.
L’initiative des princes ecclésiastiques, dans la mesure où elle recevrait le soutien interne nécessaire, pourrait éventuellement permettre de jeter les ponts entre acteurs congolais et ainsi vider certains problèmes congolo-congolais. Quant à sa capacité à mobiliser les acteurs externes de ce conflit, les médiateurs des processus de Luanda et Nairobi pourraient toujours être mis à contribution, car certaines questions pendantes devront être traitées dans les cadres régionaux et sous-régionaux .
En attendant de voir dans quelle mesure cette initiative de la CENCO-ECC servira de béquille à la concrétisation des efforts diplomatiques pour une paix durable dans l’est de la RDC ainsi que dans la région des Grands Lacs, vous pouvez rejoindre notre fil WhatsApp en envoyant « GEC » ou « Ebuteli » au + 243 894 110 542 pour recevoir Po Na Biso chaque vendredi sur votre téléphone.
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