Pourquoi la RDC risque l'exclusion de son café et de son cacao du marché européen
Le 17 décembre 2024, la Fédération des entreprises du Congo (FEC) a adressé une lettre à Julien Paluku, ministre congolais du Commerce extérieur, sur le risque d’exclusion du café et du cacao congolais par l’Union européenne (UE) de ses marchés et dont l'application doit intervenir en décembre prochain.
Bonjour et bienvenue dans ce 1e épisode de la saison 5 de Po Na Biso, la capsule audio d’Ebuteli et du Groupe d’étude sur le Congo (GEC) qui tente d’éclairer l’actualité de la RDC. Je suis Agenonga Chober, chercheur principal pour les Uélé au sein du pilier violence d’Ebuteli. Nous sommes le vendredi 10 janvier 2025.
Dès décembre prochain, en application de sa politique « zéro déforestation », l’UE interdira l’exportation, sur ses marchés, de sept produits dont la culture pourrait avoir contribué à la déforestation ou à la dégradation des forêts depuis fin décembre 2020. L’UE justifie cette exclusion par la protection de l’environnement et la lutte contre le réchauffement climatique. Parmi les produits visés, il y a le café et le cacao dont la RDC est productrice. Pour être admis sur le marché européen, ces produits devront désormais faire l’objet d’une certification par un organisme agréé. Or les organismes en question estiment que leurs enquêteurs ne peuvent pas accéder aux zones de culture de ces produits à cause de l'insécurité, et refusent donc la certification aux produits congolais.
Cette annonce intervient alors que sur le marché mondial, la tonne de cacao est passée, en l’espace de trois ans, de trois mille à 12 milles dollars américains. Une énorme opportunité pour la RDC qui, depuis 2020, exporte, en moyenne 30 000 tonnes de cacao par an, avec un potentiel estimé à 100 milles tonnes par an. Durant la seule année 2023, l’exportation de cacao aurait rapporté, selon la FEC, près d’un demi milliards de dollars américains pour la RDC, faisant de ce produit la deuxième source de recettes en devises provenant des exportations du pays après les minerais.
Côté congolais, le gouvernement n’a pas caché sa désapprobation. Dans un point de presse tenu le 30 décembre dernier, Julien Paluku a qualifié d’injustifié cette mesure d’exclusion, redoutant même que l’UE roule en faveur des pays voisins de la RDC responsables du pillage de ses produits qui sont ensuite exportés vers l’Europe. Pour cela, il a plaidé pour une tripartite gouvernement congolais, UE et Monusco en vue de la sortie de la RDC de cette liste noire.
La culture de café et de cacao favorise-t-elle la déforestation en RDC ? Toutes les sources interrogées, y compris celles des services de l’environnement congolais, reconnaissent que les activités agricoles constituent le premier moteur de déforestation dans la zone de culture de café et de cacao. Cependant, il semble difficile d'établir si cette déforestation est survenue après décembre 2020, période concernée par les mesures européennes.
Toutefois, ces cultures sont loin d’être les seules responsables de la déforestation. Les activités minières dans les forêts et l’exploitation illicite des bois jouent également un rôle majeur. Ces restrictions, perçues en RDC comme une politique sélective de l’UE, soulèvent plusieurs questions notamment sur la traçabilité des produits agricoles antérieurs en cette date.
En l’absence de conformité aux critères européens, la RDC risque de subir des impacts économiques significatifs notamment l’effritement des recettes de l’État congolais et une aggravation de la contrebande à grande échelle qui s’est installée depuis longtemps dans la chaîne d’exploitation de café et de cacao en RDC dont plus de la moitié de production est exportée frauduleusement vers l’Ouganda.
Sur le plan environnemental, rien ne garantit, pour l'instant, que cette mesure sera efficace, surtout si les activités telles que l'exploitation minière et de bois d'œuvre restent épargnées. Les populations riveraines restent extrêmement dépendantes des forêts d’où elles tirent leur revenu , notamment par l'exploitation des bois pour la construction ainsi pour la braise dont des quantités impressionnantes sont exportées vers les grandes villes de la région voire à l'étranger
Sur le plan sécuritaire, la mesure n'apporte pas de solution à la criminalité entretenue par des groupes armés impliqués dans les activités minières en zones forestières et qui contrôlent une partie du commerce de cacao, de café et autres produits agricoles.
Pour cela, il semble important que l’UE accède à la demande des pays exportateurs africains sollicitant un délai supplémentaire en vue d'une solution mutuellement avantageuse.
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