Crise du M23 : faut-il encore croire aux promesses de cessez-le-feu ?
Le 18 mars, à l’initiative de l’émir du Qatar, les présidents de la RDC et du Rwanda se sont rencontrés à Doha. Dans leur communiqué final, les chefs d’État ont réaffirmé l'engagement de toutes les parties pour un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel. Pourtant, un jour plus tard, les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) ont pris la cité stratégique de Walikale, au Nord-Kivu. Et malgré leur engagement public de se retirer de cette localité, pris le 19 mars, les rebelles l’occupent toujours, et tentent même de renforcer leurs positions. Ceci, et d’autres épisodes antérieurs similaires, posent question : le M23 et le Rwanda cherchent-ils vraiment, comme ils l’affirment, à résoudre cette crise par le dialogue ?
Bonjour,
Je m’appelle Henry-Pacifique Mayala. Je suis le coordinateur du Baromètre Sécuritaire du Kivu. Vous écoutez le douzième épisode de la saison 5 de Po Na Biso, la capsule audio d’Ebuteli et du Groupe d’étude sur le Congo, centre de recherche indépendant basé à l’Université de New York. Chaque semaine, ce podcast vous offre notre point de vue sur une question d’actualité en RDC. Nous sommes le vendredi 28 mars 2025.
Le 8 février 2025, le premier sommet conjoint des communautés d’Afrique australe et de l’Est, (EAC-SADC), qui incluait des représentants de la RDC et du Rwanda, formulait un appel commun au « cessez-le-feu immédiat et inconditionnel » dans l'est de la RDC. Mais dans les jours suivants, la rébellion du M23 soutenue par le Rwanda continuait sa marche en avant, prenant l’aéroport de Kavumu et la ville de Bukavu. Réunis à Harare, au Zimbabwe le 17 mars 2025, les ministres des Affaires étrangères de l’EAC et de la SADC ont présenté une nouvelle feuille de route ambitieuse qui prévoit d’instaurer un autre cessez-le-feu ainsi que la cessation de toute expansion du territoire endéans 30 jours. Cet engagement a été renouvelé le 24 mars lors du deuxième sommet conjoint tenu en ligne. Faut-il croire aux chances d’une instauration du cessez-le-feu par les deux parties ?
Ce n’est pas la première fois que les parties violent un cessez-le-feu auquel elles s’étaient engagées. Le M23 avait par exemple annoncé une cessation d’hostilités début février 2025, pour des raisons humanitaires. Les rebelles avaient également affirmé n’avoir aucune intention de prendre la ville de Bukavu avant d’en prendre le contrôle.
En dépit de son discours public, la volonté du Rwanda de trouver un accord de paix peut également être questionnée. En décembre 2024, le président rwandais avait refusé de se rendre à Luanda pour rencontrer son homologue congolais dans le cadre de la médiation angolaise, avançant le fait que Kinshasa refusait de s’engager à négocier directement avec le M23. Mais le 18 mars 2025, alors que Kinshasa avait finalement accepté le principe de ces négociations, le M23 a refusé de s’y rendre, justifiant cette absence par les sanctions européennes contre ses membres.
Côté RDC, la volonté de respecter les cessez-le-feu et de résoudre ce conflit par la négociation paraît également très incertaine. Durant le déploiement des forces de réaction de la communauté de l’EAC, censée consolider un cessez-le-feu, l’armée congolaise s’est par exemple appuyée sur les groupes alliés, dits Wazalendo, pour continuer le combat et attaquer les positions du M23.
Les protagonistes semblent avoir opté pour une approche stratégique du « fight and talk », c’est à dire qu’ils n’acceptent de participer aux discussions uniquement pour faire bonne figure sur la scène internationale, et profitent des temps de répit offerts par les cessez-le-feu pour tenter de se réarmer en vue de nouveaux affrontements.
Dès lors, il semble légitime de questionner les chances de réussite de ce nouvel appel à un cessez-le-feu ainsi que du format des médiations, en vue d’une résolution pacifique de ce conflit. Au-delà de l’extension de l’équipe des médiateurs, désormais composée de cinq anciens chefs d'État et de gouvernement, que ces derniers disposent de moyens de pression sur les parties pour que ce processus ait des chances d'aboutir.
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